QUELQUES CADAVRES POUR NOS TRÔNES
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L’intelligence humaine dont on dit pourtant un bien fou depuis des lustres, n’est donc capable que de produire le désastre, elle n’est donc capable que de nous mener à la mort ?
J’ai suivi, effaré, sur France 24 un débat sur la guerre en Ukraine. Il était question de livraison d’armes, d’enlisement de la guerre et même de l’éventualité d’une guerre nucléaire. Les ‘’débateurs’’ parlaient avec le détachement des commentateurs d’un match de football jusqu’à ce que l’un d’entre eux, un vieux monsieur tout ridé, l’espèce sans-dents dont se moque François Hollande, balance: « ceux qui ont entrepris d’affaiblir la Russie, le paient pour l’instant avec le sang du peuple ukrainien »; sa réplique eut l’effet d’une bombe, silence sur le plateau, ses interlocuteurs sonnés, bredouillèrent quelques incantations inaudibles, la journaliste accusa le choque pendant quelques secondes puis, fouilla ses fiches, à la recherche d’une question de relance. Dans la lucarne gauche de l’écran, le vieux ridé lâcha un sourire pudique, ravi.
La veille, le secrétaire d’état américain à la défense, Lloyd Austin, promettait pendant sa conférence de presse, un appui militaire supplémentaire de 700 millions de dollars à l’Ukraine avant de déclarer que, je cite : «l’Ukraine peut gagner la guerre contre la Russie » fin de citation.
Rien que ça… gagner une guerre contre la première puissance nucléaire du monde. Et pendant ce temps, elle, cette même Russie de Vladimir Poutine surnommé ‘’le boucher’’ par son collègue américain, serait entrain de faire quoi ? De planter des carottes ?
Tenez, à titre indicatif : Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH) annonce 4.335 victimes civiles dans le pays (Ukraine): 1.842 tués et 2.493 blessés, au 11 avril 2022. Le HCDH a précisé par ailleurs que les chiffres réels pourraient être plus élevés. Ce n’est pas cher payé vu que Boris Johnson, le premier ministre britannique n’entrevoit pas la fin de la guerre avant fin 2023.
A supposer même que vaincre la Russie eut été possible, quel en aurait été le coup humain ? Qui l’aurait payé ; les peuples ? Ces messieurs et dames qui régentent notre monde réfléchissent-ils à autre chose qu’à la taille de leurs sexes ?
Quand ils auront tout dévasté sur leur chemin avec des explosions nucléaires, ils régenteront qui après ; des cadavres calcinés et un désert de cendres ?
Le moins que l’on puisse constater est que nous sommes à l’avant-veille d’un monde désarticulé où la vie humaine ne vaut plus rien. On tue tous les jours, on tue partout, on tue pour le spectacle, on tue pour la propagande, on tue par milliers, on tue tout, on tue de loin, on tue depuis les nuages, pour garder les mains propres, et on rote bruyamment le trop plein d’égo, et on sourit aux caméras, et on fait l’amour à la chaire froide la nuit, toutes lumières éteintes, loin des miroirs, et le lendemain, on se remet à tuer, enceinte du même monstre… pour notre trône, pour notre pouvoir, pour notre survie, pour notre éternité… oui, notre éternité s’abreuve du sang de l’autre, elle se nourrit du souffle de l’autre, de la ruine de l’autre. Et nous, nous détournons les yeux ; depuis le temps que nous sommes habitués à les regarder baver des cruautés et des abominations, nous savons qu’ils sont capables de pire. Demain nous irons au cinéma avec nos copines, nous boirons dans les mêmes bars sombres et nous rentrerons nous étaler dans nos draps, sur le dos, les jambes écartées par quelques notes de blues. La vie continue !
Bien entendu, tant que rien ne nous (citoyens du monde) touche directement, notre indifférence collective et nos murmures de spectateurs cyniques suffisent à nous faire passer pour des plus civilisés et des donneurs de leçons. Pourvu que ça dure !
Ousmane ALEDJI